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6 janvier 2012 5 06 /01 /janvier /2012 06:33

 

 

 

 

Parce que Papa, il jetait son chapeau, là où il tombait : Il allait !  Il est parti tout seul. Il ne savait pas un mot de français. Maintenant l'Italien, c'est courant. Tout le monde sait se débrouiller en Italien !  Mais à ce moment-là l'Italie c'était loin !

Ils étaient tout jeunes mariés. Elle était enceinte de moi. Il avait fait dire par un autre Italien : Tu dis à ma femme que je vais travailler à "Luvigny" ! (Mais ça ne lui donnait rien du tout à ma mère !)  Mais je lui enverrais de l'argent et c'est ce qu'il faisait.

 

Il était contremaître. Et c'est là qu'il a eut le plus de mal. Une fois qu'il a été un petit peu reconnu tout s'est arrangé ! Il a trouvé des gens qui sont devenus des amis intimes… 

Alors les Italiens se sont intégrés petit à petit.

Il n'y en a pas eu beaucoup à retourner chez eux.

 

 

Pierrette

 

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28 juillet 2010 3 28 /07 /juillet /2010 13:24

Rencontre hier, dans une maison de retraite, avec un vieux Monsieur dont je dois rédiger l'histoire de vie.
Il me raconte comment il est un fils de la guerre 14-18. Comment, quelque part, il est né grâce à elle !

L'homme est, en effet, venu au monde le 28 mai 1919. Il a donc été conçu fin août 1918, me confie-t-il. Son père en effet, à cette époque, rentrait de la guerre, après quatre années au front, libéré avant l'heure, parce que père d'une famille nombreuse, quatre enfants déjà. Ce petit dernier qui naîtra, n'était donc pas au programme mais tant d'années d'absence et de souffrance déterminent bien des choses... Voilà donc l'enfant de la guerre et de l'amour ! Il faudra, malgré tout, une deuxième boucherie pour que naisse le précepte de "Faites l'amour et pas la guerre" que dans les années 70, son fils, mon ami, cheveux long et, ma foi, idées pas si courtes, appliquera avec ferveur.

 

 

(A l'attention de mes abonnés : vous avez remarqué que cet article est déjà paru dans mon autre blog littéraire/article : journal de juillet : http://s.prioullescoudrettes.over-blog.com

mais que sa place est aussi ici puisqu'il traite du quotidien des gens dont ce blog se veut être une vitrine.)

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4 juin 2010 5 04 /06 /juin /2010 08:29


"Si je faisais pipi au lit - j'avais une faiblesse avec ça ! -

eh ben vous ne savez pas ce qu'ils me faisaient ?

Ils mettaient mon drap sur la tête et je faisais le tour de la pension,

de la cour avec mon drap…

" Elle a fait pipi au lit ! Elle a fait pipi au lit ! " qu'ils chantaient .

Ils me mettaient la tête  sous la pompe.

Il y en a une qui me tenait l'autre qui  pompait…

C'était comme ça !"






Entretien avec Georgette Leboissetier
 le 22 2 2006 en présence de
Hélène Leduc
Marie Cador
Victorine Prioul
Marie Jeanne Chérel



 

 

 

 

Note du transcripteur :

Ce témoignage est mis en ligne quasi tel quel, avec ses fautes de langage, son parlé gallo, les hésitations de Georgette qui, cette fois-là, encouragée par une assemblée réduite lors de ces rencontres que j’organisais en 2006, se sentit prête à nous parler davantage de sa vie.








De toute façon j'ai jamais été gâtée, moi ! J'avais une sorte d'orange, c'est tout ce que j'avais.
- (Marie) La pauvre Georgette, elle a été martyre !
Faut pas dire ça. Faut pas… dire ça…
-    Avec tes bonnes sœurs ? Moi je t'ai vue, je t'ai vue !
C'est de la faute à qui… ?
Vous étiez pas en pension, tandis que moi j'étais en pension et ma sœur aussi… Et ma sœur était très bien vue, parce qu'elle apprenait tout ce qu'elle voulait ; moi j'avais du mal… Elle ("la Ducoin") avait arrachée presque une oreille à la Renée Colas. Eh ben elle lui avait décollée l'oreille !
Moi ce qu'avait fait ça …: il y avait avec Rillé, la communauté… mon père nous avait placé toutes petites… Je ne sais pas si je n'ai pas une vieille carte de là… Parce que j'ai été élevée là, moi… eh ben mon père il nous avait mis d'abord à la communauté et quand on est arrivé à l'âge de 5, 6 ans ; on est allé à Jovence qu'on a été là toute notre vie ! Pas de vacances, jamais ! Mon père allait à la messe avec ses enfants de chaque côté… tous les dimanches il nous apportait une brioche… il venait payer la pension. Forcément. Fallait payer la pension le 2. On avait commencé à apprendre le solfège, moi j'adorais le piano… Ça coûtait trop cher. Allez ! supprimé le piano! Il venait nous chercher, il donnait de l'argent pour acheter des livres neufs… quand il était parti c'était pas des livres neufs qu'on avait ! C'est pas nous qu'on les avait ! C'était à des personnes "bien " ! Que les parents étaient "bien" et nous on avait les vieux livres ! Eh ben voilà, c'est comme ça que ça s'est fait ! Et mon père ne disait jamais rien…

Je me suis échappée deux fois de la pension, avec la Germaine Lemarrié… Elle est partie, elle… on avait combiné ça, on en avait tellement mare… elle avait combiné qu'on aurait parti pendant la récréation… Le portail de Jovence il restait toujours ouvert… pendant la récréation, nous voilà parties toutes les deux… alors moi " où je vais ? " Chez la Maman Achin qu'elle m'aimait tellement la bonne sœur là ! et la Germaine Lemarrié à pied jusqu'à Mellé, elle !
Alors mon père quand il avait fait du commerce avec un client, ça se terminait chez la mère Touzé qui tenait le café et ce coup-là, c'est qu'il m'a vue passer… à travers les carreaux, le voilà qui s'amène chez nous : " Et qu'est ce que tu fous là ?… " Eh ben dis donc ! J'ai reçu un coup de pied dans le derrière quoi ! Et il dit à ma sœur Madeleine qu' était grande… chez nous qui tenait la maison… Elle m'a remmenée jusqu'à Jovence. Bon ils n'ont rien dit à Jovence, mais elle était pas trop partie , fallut m'enfermer dans le grenier et le soir ils m'ont enfermée dans un grenier - oh, vous allez rire peut-être ! C'est pas à rigoler, j'ai pris ça pour de vrai, moi ! -   il y avait un grenier où qu'on couchait et alors ils m'ont enclenchée là-dedans… alors j'étais devant un armoire à glace, enfin c'était pas des glaces… c'était des carreaux… vitrée et que des bêtes sauvages qu'étaient empaillées, il y avait des chouettes, des hiboux… de quoi qui faisait peur… holà mon dieu je criais là-dedans… ils ont été obligés de me défermer, hein ! Je croyais que c'était en vrai les bestioles là !

Si je faisais pipi au lit - j'avais une faiblesse avec ça ! - eh ben vous ne savez pas ce qu'ils me faisaient ? Ils mettaient mon drap sur la tête et je faisais le tour de la pension, de la cour avec mon drap… " Elle a fait pipi au lit ! Elle a fait pipi au lit ! " qu'ils chantaient . Ils me mettaient la tête  sous la pompe. Il y en a une qui me tenait l'autre qui  pompait… C'était comme ça !

J'ai failli mourir parce que j'ai eu la rougeole et ma sœur aussi, on l'a eu toutes les deux… Et mon frère qu'était chez nous il l'a eu en même temps aussi, c'est marrant, hein ! J'ai eu le croup et je me vois encore, ils ont été chercher le docteur, en pleine nuit … Je me vois sur les genoux de mon père, j'allais mourir, ils m'ont fait… - le docteur Demontigny à ce moment-là - … des piqûres, des piqûres et je m'en suis tirée.
On allait en rang, c'était  Jovence, c'était plus à la Communauté, quand je voyais Maman Achin, puisque je l'appelais comme ça, quand je voyais Maman Achin qu'arrivait dans la cour je courrais l'embrasser.

Les sœurs de Coutances:
 J'y ai été bonne sœur, je le dis franchement, parce que je ne savais plus où aller. Mais enfin je n'ai pas regretté. Je suis partie à 15 ans, je suis sortie à 26 ans. Je ne regrette pas mes années parce que je n'ai fait que du bien…
J'ai fais les trois années scolaires… comme si j'étais à l'école. Après j'ai monté au postulat et après j'ai pas fait bonne sœur… Et j'ai été placée en infirmerie pour soigner les sœurs malades parce qu'il n'y avait pas de civils autrement. Avec la sœur St Ignace que vous avez dû connaître, qu'était à Louvigné. Je lui aidais et puis un jour je suis tombée malade… alors le docteur vient, il dit votre petite sœur là il va falloir la mettre à la campagne, elle a besoin d'air, alors ils m'ont placée à Cérans, j'avais vingt ans,  c'est pas loin de Coutances et là j'ai été placée en maison de retraite. Les p'tit pères ils disaient " la petite bonne sœur qu'ils nous envoient, qu'est ce qu'est est mignonne ! " J'avais soin… enfin c'était un hospice, il n'y avait rien de moderne. J'avais soin, je faisais le repassage, je faisais le ménage j'avais tout un dortoir où ils étaient 10… Je les soignais le matin, je les habillais, je faisais tout comme une infirmière, j'ai même fait des piqûres…
Avec les années, je dis quand même "… mais qu'est ce que je fais là ? " Je voulais des enfants. Je voulais me marier. Un jour j'écris une lettre à Alphonse, à mon frère. Comme c'était lui l'aîné. Carrément. Secrètement, malheureusement cela ne m'a pas porté chance, cette lettre-là non plus !
Je donne la lettre à une personne qu'allait au bourg de Cérans. Je dis "Vous ne pourriez pas mettre la lettre à la poste ?" La supérieure qui sort "Où vous allez comme ça ?" qu'elle dit à la petite mère-là. "Vous avez une lettre ? " Elle dit " Oui c'est la petite sœur - je m'appelais sœur Jeanne, Jeanne de Valois, s'il vous plait ! - " Eh ben elle dit " Vous allez me donner la lettre " Parce que j'avais pas le droit. Fallait qu'elle passe par elle ! Bein bon sang quand elle a vu ma lettre ! Mais elle était gentille la supérieure, elle m'aimait comme sa fille… Alors bon elle me dit "vous n'avez pas le droit " et puis c'est tout.
Alphonse est venu me voir, une fois. Et puis je lui ai dit ça de vive voix… et puis bon j'ai fait un peu la folle… J'ai dit à la supérieure carrément " Je voudrais m'en aller, je voudrais retourner dans la vie civile " - Parce qu'on a 5 ans… et après 5 années c'est des vœux perpétuels que vous faites. J'étais libre encore. Alors là j'aurais plus été libre. Alors j'ai expliqué ça à la supérieure, elle m'aimait beaucoup ! Je l'ai suppliée. J'ai passé des bouts de nuit à genoux près de son lit pour qu'elle me dise "oui, ben partez ! " Ben on est arrivé comme ça… Alphonse est venu me chercher à la gare et tout… J'étais arrivé chez lui Alphonse, puisqu'il s'était remarié… Je suis partie comme ça !
Un jour, j'étais chez ma tante de Fougères, ça s'est fait comme ça le mariage. Quand je suis sortie de communauté, je prenais pension chez ma tante de Fougères. J'avais été travailler à Fougères et puis je venais… un dimanche de la Toussaint, ma tante me dit " écoute Georgette : tu irais tout de même bien à Louvigné sur la tombe de tes parents ". Je dis "non", j'avais honte, je ne sais pas pourquoi. Et puis je vois mon fameux Pierrot… le père Pierre Pennetier. Me voilà arrivée à Louvigné, le Pierrot me voit ; il demeurait rue de St Hilaire à ce moment-là, il me dit : "tu vas te marier maintenant ?" (il était comme ça) parce que je te connais un gars, un bon gars - c'est vrai que Papa était un homme formidable - je dis "… quand même non ! " "Bein; il dit ; on ira te voir un dimanche "

Voilà le dimanche arrivé, j'étais à la messe avec ma tante… On sort de l'église de Bonabri… ma tante elle s'en va… moi avec elle forcément. Elle demeurait dans la rue des Feuteries, elle va pour rentrer dans le corridor, je sens quelque chose qui me tire le dos comme ça… c'était mon Pierrot qu'était là… Il dit "tu pourrais venir 5 minutes ! " Ma tante elle dit "qu'est-ce que tu veux Georgette ? " Je dis " Eh bein c'est un de mes cousins " J'avais pas vu le gars qu'était à côté, c'était le Constant ! J'avais mon livre de messe à la main, je lui donne à la tante. Nous voilà partis au café de la gare…J'avais pas été longtemps mais  elle avait regardé par la fenêtre. J'arrive… ma tante elle dit " Dis donc qui c'était le jeune homme qu'était avec ton cousin ? " Je dis " C'était un de ses copains "
Bein ça s'est fait comme ça ! Dans la semaine je reçu une lettre… trois mois les noces !
Constant, le p'tit biche ! Daniel qu'est à Nimes l'ancien, je l'ai eu en 47.

*****
 
J'ai passé sous la guerre.
A Coutances. Je serais restée à Coutances, à l'infirmerie quand j'étais avec la sœur St Ignace, je ne serais plus là parce que il y en a eu dix de tuées. Je serais descendue dans la cave avec toutes les infirmières et les malades, eh bein toutes les sœurs y ont passé… j'étais partie à Cérans à ce moment-là. Il y avait des bombardements épouvantables. On était caché sous un grand escalier de pierre à la chapelle à Cérans. Et moi j'étais pas là au moment des bombardements, j'étais cachée dans la lingerie… la lingerie était assez loin de la communauté, il y avait des champs et tout ça - je m'occupais de tout le linge, je repassais le linge des allemands aussi ! Il y en a qui étaient gentils, ils m'apportaient leur linge, je m'en occupais - Je m'étais cachée sous la grande table où je repassais le linge, j'entendais les balles qui tombaient dans les lavoirs, à côté… Tout à coup une sœur qui m'appelle, qui m'appelle… Alors je lui ai donné la main, on a couru à la communauté en vitesse. J'ai embrassé la directrice, on se groupait toutes auprès d'elle tellement ça faisait peur d'entendre les bombes tomber.

A Coutances ça j'y passais ça c'est sûr…! Sœur St Ignace, son crucifix lui était rentré dans le ventre !

J'ai été heureuse quand j'ai été mariée et que j'ai eu mes enfants. C'est ça qui m'a sauvé. Eh bein vous voyez j'ai perdu tout mes frères et sœurs. Je suis toute seule maintenant. J'ai mes enfants heureusement. C'est vrai, jamais j'aurais cru… avoir souffert et tout de que j'ai eu… j'ai tout supporté. Me voilà encore et toute seule… c'est ça je ne peux pas m'en faire l'idée… Être toute seule et que j'ai tant souffert ! J'ai surtout eu beaucoup de chagrin quand j'ai perdu André il y a deux ans, j'aimais bien André, il était à St Martin de Landelles.

*****

Mes enfants savent pas tout. Ils n'en savent quand même, mais enfin bon …! Voilà, voilà je vous en ai raconté mais faut pas n'en faire un roman !
Je sais, je dis si j'avais voulu j'aurais fait un roman !
Pratiquante ? Ah non pas tellement. J'y vais quand même. J'y vais quand je peux mais autrement…
Quand je vais chez Gilbert qu'est derrière, je vais à la messe, et quand je vais chez Michel à la Linais j'y vais pas. Parce que il y a loin et maintenant que les courses de vélos vont commencer, on mange à telle heure… De toute façon j'en ai pris pour toute ma vie ! 



La silicose:

Constant est mort en 93. Il était né le 24 juin 18. Moi je suis de 19. Il y avait un an. Il aurait pu vivre plus longtemps que cela s'il n'avait pas eu la silicose. Tous ceux de la Guinchère (les picaoüs) sont partis comme ça, de toute façon…Vous n'avez qu'à remarquer.
Tirer au cul. C'est ce qu'il lui ont dit à la sécurité. Il a passé combien de visites ? Il n'avait jamais assez de silicose !
Il avait 59 ans. Je m'en rappellerai toujours il va voir le docteur Demontigny, le René. Il lui faisait monter les escaliers et tout, il avait bien du mal à monter les escaliers. Il dit vous n'avez pas trop de silicose.        
Et pourtant quand ils l'ont emmené à Pontchaillou qu'ils lui ont vu les poumons, ils ont dit : Madame il devrait être à 100 pour 100 votre mari ! (Il n'avait que 10 pour cent !) On n'a jamais vu des poumons comme ça ! Une vraie éponge !

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